Avec toutes mes excuses, Janvier 2017 – Céleste

Avec toutes mes excuses, Janvier 2017 – Céleste

Avoir retrouvé mon père avait remis de l’ordre dans tout. Comme si ce qui aurait du me tenir droite depuis le tout début avait enfin jailli du sol.
On pourra dire ce que l’on veut. Je pourrais me redire mille et une fois ce motto qui m’a accompagné des années « Ca ne sera que moi, et moi seule jusqu’à la fin de ma vie », avoir trouvé ce repère avait mis une majuscule à la première phrase qui avait ouvert le livre de ma vie.
Et m’avait donné envie de corriger la syntaxe entière du corpus.

Et cette correction faisait mal.

Des coups dans mon ventre venaient troubler le calme extérieur.

Je me haïssais pour ce que j’avais été. Ce que j’avais fait.
Ce que j’avais bu. La personnalité que je m’étais insidieusement construite à coups de larmes et de mélancolie.

J’avais joué un rôle qui m’avait lamentablement laissé terrassée au sol.

Une capricieuse hyper sensible. Une poupée de chiffon à l’allure de guerrière. Une accro à l’attention.

Pouvais-je corriger mes erreurs ? Avais-je blessé des gens ? Et si oui, gravement ? Des excuses seraient-elles profitables ?

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Le seigneur est mon berger, On the Road – Nina

Le seigneur est mon berger, On the Road – Nina

J’ai toujours cru en Dieu. Je ne me suis jamais posée la question. Il y a un dieu à l’image de l’homme et c’est ainsi.

C’est ce que papa croyait.

C’est donc ce que j’ai cru.

Céleste m’inspirait beaucoup de bienveillance. Je sais qu’elle avait foulé des terres où je ne serais jamais allée. Fait des choses que l’on pouvait trouver réprouvables. Mais il émanait une lumière de Céleste. L’importance du prénom, sans doute.

Moi, mon prénom, est un diminutif de Christiana. L’on dit aussi qu’il provient des langues hispaniques et qu’il évoque une petite fille. Tout semble bien fait, n’est-ce pas ?

Qui aurais-je été si l’on m’avait nommé Louise (la combattante ?).

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La Bassée, On the road – Céleste

La Bassée, On the road – Céleste

Pendant des années, je n’avais plus touché un centimètre de verdure. Émue, je l’étais. Seule, incroyablement abandonnée.

Il m’a fallu que d’un instant, les pieds nus dans ce champ pour que tout me revienne. Si des mots comme époustouflant, rayonnant ou chaleureux n’avaient pas été galvaudés par des meutes d’écrivains, c’est ceux-là que j’aurais employés.

De l’herbe sèche qui pique mes orteils, une terre avide d’eau qui craquèle, nous permettant de découvrir une vie souterraine grouillante. Une odeur de bitume mélangée à celle de racines, de jeunes pousses.

J’ai aimé la nature comme je n’ai jamais aimé personne ou quelque chose.

J’ai aimé la musique qui en émanait. Une musique faite de vent, de gouttes, de chants de merle. Comme celui-ci, qui vole dessus moi, ou celui-là qui au loin semble vouloir appeler un congénère.

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Prologue & Epilogue – Patrice

Prologue & Epilogue – Patrice

J’aimerais comprendre. Me comprendre.

Je suis un salaud. Je suis un sale type. J’ai des idées dégueulasses qui me traversent la tête. Souvent. Depuis longtemps. Je sais que je suis répugnant. J’avais pris pour parti de mener une vie la plus normale possible. Que d’être carré me soignerait. Je suis malade.

Ce ne sont pas des paroles de pénitence. Ni d’excuses.

Je pourrais vous dire que j’ai été violé. Touché. Abusé. Jeune. Mais il n’en est rien.

Je pourrais vous dire que ma mère m’a douché jusqu’à l’âge de 14 ans. Mais c’est faux.

 

Je suis un salaud. J’aime le corps de ma fille. Sans forme. Propre. Qui sent le shampoing aux fruits et le sucre.

Je n’ai jamais voulu faire de mal à quelqu’un. Encore moins à elle.

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Les deux marcheuses, 16 Juin 2016 – Pierre

Les deux marcheuses, 16 Juin 2016 – Pierre

Elles avançaient côte à côte, régulièrement. J’ai ralenti pour ne pas les dépasser. J’ai donné quelques coups de pédales en moins. Deux femmes, cheveux longs. Assez différentes cependant. Deux sacs à dos. Impossible de deviner leurs corps cachés derrière.

Je ne peux plus ralentir, j’arrive à leur niveau. Les salue.

Elles répondent d’un sourire. Quelques gouttes de sueur ont du perler sur leur front dans la journée. Il est 16h. Moi, je rentre du travail. Le soleil est loin d’être couché.

« Qu’est ce que vous faites les filles ? C’est pas courant de voir des gens marcher le long de cette départementale ».

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Le Dîner – Coline

Le Dîner – Coline

Je n’ai pas appelé. Pas envoyé de message. Je n’ai pas prévenu. La nuit est tombée, j’ai confié la petite. Et j’ai attendu. Sans bruit. Sauf celui du lave vaisselle.

Ce sont les 2 heures les plus longues de ma vie.

J’ai fait cuire du riz. Il ne mange pas le soir, généralement, il a mangé avant, mais il devra se mettre à table. J’ai mis une nappe. Mais un gros pull. Je meurs de froid. Je n’ai pas allumé la grande lumière, trop brute.

Je le ferai d’abord asseoir sur le canapé. Il refusera, mais je lui lancerai un regard sans appel. Le canapé semblera si dur que je m’y poserai à peine. Sur un bout de l’angle. Je lui désignerai l’autre bord.

Pas besoin de se poser la question de si je l’embrasserais à son arrivée.

On ne s’embrasse plus vraiment à ses retours. J’ai cru que l’arrivée de la petite m’avait rendue plus mère que femme. Que c’était normal.

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Vaux-le-Pénil (2) – Nina

Vaux-le-Pénil (2) – Nina

Déjà, à travers l’œillet, j’aurais pu le deviner. Le même nez.

Quand elle m’a donné son nom de famille, tout s’est éclairé.

Céleste est la sœur de Louis. Mon Louis. Celui que j’avais lamentablement fui alors qu’il voulait me sauver.

J’avais eu 3 ans pour regretter ma faiblesse. 3 longues et atroces années. Alors je n’avais plus à réfléchir. J’ai montré à Céleste mon corps. Louis lui avait parlé de moi.

Elle a caché ses larmes. Je l’admire déjà.

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Vaux-le-Pénil – Céleste

Vaux-le-Pénil – Céleste

C’est quand on a tourné à l’angle de la rue que Nina a de nouveau remis son armure.

Moi, j’avais changé: j’avais décidé de prendre le temps. Chaque seconde allait compter. Avoir une partenaire de marche n’était pas dans mes projets. Mais je prendrai le temps pour elle. Nina m’a touché dès qu’elle a ouvert sa porte. Une femme banale, si fragile. Un gabarit moyen, des yeux communs, des cheveux qui cachent ses traits tirés.

Quand elle a ri. Quand elle a ri, tout a changé. J’ai attrapé sa main et sa maison si nette, si propre, si organisée: pas un seul livre.

Nina m’a tout raconté. Sans mot. Elle m’a montré son dos.

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Le Poème Imbibé, mai 2015 – Céleste

Le Poème Imbibé, mai 2015 – Céleste

Toute petite et toute fripée,

dans un coin, j’me suis couchée

seule m’accompagne ma nudité,

dans le noir, je me refais,

le film de ma vie

de toute petite, les pissenlits,

à maintenant, nue dans mon lit.

 

J’ai décidé qu’pour m’apaiser,

J’allais plus m’laisser aller,

Fallait pas qu’j’sois accompagnée

Par de bras gros et musclés.

 

Alors debout dans mon salon,

C’est mon pinceau que je saisis,

Et sur la toile déjà ternie,

C’est pas ton visage qui se dessine.

 

C’est un soleil, puis une colline,

C’est le chien de grand mère et le paradis,

C’est que des formes géométriques,

En mille couleurs que je décline.

La tasse brisée – Quelqu’un

La tasse brisée – Quelqu’un

Elle tourne en rond. De petits ronds. De plus grands. Au fur et à mesure. Elle s’est même cognée dans un mur et la table. Ça en devient presque frénétique. Elle fait des ronds, et elle a l’impression de danser.

Dans sa tête, trop d’images. Elle en a perdu le son. Elle danse sur les couleurs qui jaillissent. Elle n’est plus vraiment là. Il lui a dit que c’était un état dépressif, mais elle s’est dit que la médecine avait pas encore compris que l’art n’était pas une maladie comme les autres.

Elle est infectée, une plaie grande ouverte. Son appartement est un pansement qui la protège des autres bactéries qui menacent de rentrer.

Elle a tapé dans la table.

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